jeudi 17 décembre 2009

Profanation.


Il m'a rarement été donné de lire un roman aussi prenant et répulsif à la fois... Peut-être parce que l'histoire du Vampire de Ropraz nous est narré avec toute la froideur chirurgical du légiste détaillant une autopsie ou parce qu'au final, on sait que ces évènements tragiques se sont réellement déroulés, avec sa conclusion historique tricolore tragique, tombant sur le lecteur comme un couperet. Chessex, lauréat du prix Jean Giono et du Goncourt assume le sérieux et la véracité de son histoire et nous plonge sans complaisance dans le macabre et la torpeur.
Le cadre prend place en milieu rural, dans la petite ville de Ropraz, en bordure de Lausanne, au début du Siècle de dernier. La commune vient de perdre une de ses plus belles enfants, et un villageois se rend un soir au cimeterre afin de lui rendre un dernier hommage. Le malheureux y fera la découverte macabre de la tombe mise à nue de la belle Rosa Gilliéron, décédée d'une méningite quelques jours plus tôt. Le corps lacéré, violé post-mortem, déchiqueté, vidé de son sang, la poitrine mâchée puis recraché, le entrailles sorties, le sexe sectionné, mordu, et abandonné plus loins comme un vulgaire morceau de viande soulèvera la région et réveillera les vieilles craintes primitives. On hurle au vampire et on réclame vengeance. Alors que les accusations vont bon train, des enfants sont retrouvés quelques semaines plus tard dans une commune environnante jouant avec une tête scalpé. Ce crâne décapité appartient au cadavre d'une jeune femme récemment mise sous terre, et retrouvée dans le même état que Rosa Gilliéron. Quelques jours plus tard, c'est un troisième cadavre qui est victime du vampire nécrophile. Tout le Haut-Jura est aux aboies et trouvera son suspect tout désigné en la personne de Charles Favez, jeune garçon de ferme, alcoolique, effrayant et arrêté alors que celui-ci se livrait à des actes contre-natures sur des vaches. Peu aidé, par son simplicité mentale, Favez dispose également d'attributs physiques qui intriguent et le désigne immédiatement comme coupable: malformation des dents avec longueurs excessive des incisives, cassure de la clavicule qui lui donne un démarche penché, irritation naturel des yeux qui les rendent irritables au soleil et constamment injectés de sang. Un médecin va pourtant s'intéresser à son cas et prouver son incapacité à réaliser de tel méfaits, cependant à peine sorti, Favez agresse une femme et se retrouve en geôle. La peur rôde toujours...
Ce très court roman frappe très fort et saisit le lecteur de part son détachement tout en gardant un sens du détail méthodique et quasi-scientifique. N'oublions pas non plus que le récit se déroule en 1903, en pleine campagne. Ce histoire nous plonge dans un autre temps, où l'homme n'avait pas ni l'éducation, ni les mœurs que nous bénéficions aujourd'hui. De plus, comme je le disais plus tôt nous sommes amené avec le vampire de Ropraz depuis presque un siècle sans le savoir. Mais pour connaitre toutes les révélations sur le surprenant destin de Favez, il vous faudra braver l'immondice et la superstition. Percutant.

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